mardi 4 mars 2014

Remontée du fleuve

Avec la venue de Julia et Stout (sœur et beau frère de Pauline), on en a profité pour faire la remontée du Maroni: un voyage de 5 jours de St Laurent du Maroni à Maripasoula  sur un fleuve qui sépare la Guyane française et le Suriname et qui se trouve en plein pays bushinengé (à lire en écoutant Norma Sante: une chanteuse surinamienne qui fait un carton sur le Maroni: Norma  ;) ).

Le Maroni est le fleuve le plus à l'ouest de la GF et qui fait office de frontière poreuse entre le Suriname et la GF.

Premièrement, nous avons pris la voiture pour aller à St Laurent du Maroni. Nous l'avons laissé là et avons commencé par aller à Albina au Suriname pour chercher un taxi-pirogue moins cher qu'en France pour aller vers la commune d'Apatou.

Marché de SLM
A Albina, on a pas été déçu car un mec nous a pris sur une pirogue en mauvais état où il fallait écoper tout le temps et qui allait à 2 à l'heure (le trajet à duré 4h au lieu de 2). Après coup on se dit qu'il n'avait probablement jamais été si loin en pirogue, mais ça va on est revenus en vie!

Le piroguier en question et sa pirogue blanche

En face: la Guyane française et SLM

Le début du parcours est jonché d'épaves de bateaux! Là c'est notre piroguier en train d'écoper.

Petite note culturelle que je vais essayer de faire succincte:
Les noir-marrons aussi appelés "bushinengés" (ce qui veut dire "bush niggers" ou "nègres des forêt", eh oui le terme est resté...) sont des descendants d'esclaves qui ont réussi à s'enfuir alors qu'ils avaient été emmenés en Guyane hollandaise (=actuel Suriname) lors du commerce triangulaire.
Ceux-ci se sont vite regroupés dans la forêt pour pouvoir se défendre contre les hollandais. Plusieurs groupes se sont formés au fil du temps avec, pour ceux représentés en Guyane française, les Alukus (ou Boni), les Ndjuka, les Saramaka et les Paramaka. Leur histoire est assez compliquée, mais, globalement, les hollandais ont rapidement compris qu'ils n'arriveraient pas à les battre facilement, aussi ils ont décidés de s'allier aux Ndjuka pour combattre les Aluku qui leur créaient pas mal de dommages en allant notamment attaquer les fermes des colons.
Au final il y a eu de gros combats entre Ndjuka + Hollandais versus Alukus+Amérindiens mais les Ndjuka ont eu le dessus ce qui a provoqué la fuite des Alukus vers la Guyane Française où ceux-ci ont été naturalisés (le nom de tribu "Aluku" ou "Boni" vient d'ailleurs de leurs héros de l'époque).
Les Ndjuka étaient présents, suite au combats, sur la rive surinamienne du Maroni mais une partie a traversé le fleuve pur s'installer en GF.
Les Saramaka sont venus plus tardivement en Guyane française et pour 2 principales raisons: le travail (construction du centre spatial) et la guerre civile au Suriname dans les années 90 (entre des noir-marrons, les Jungle Commandos, et l'état), et ceux ci sont surtout présents sur le littoral (SLM, Kourou).
Les Paramaka sont eux situés surtout dans l'embouchure du Maroni au niveau d'Albina et de SLM.
Ils parlent des langues spécifiques constituant un mélange d'anglais, de hollandais, de mots africains, de mots amérindiens et un peu de français (exemple: open mofou = ouvre ta bouche). Les Alukus, Ndjuka et Paramaka parlent le Nenge Tongo et les Saramaka parlent le saramacca (mélange d'anglais et de portugais). Ces deux langues sont regroupées sous le nom de Sranan Tongo. 
Les guyanais français ont la très mauvaise habitude de réduire ces langues au nom de "Taki-taki" (= talk talk), ce qui est péjoratif et mal pris par les Bushinengés. 

En résumé: Les bushinengés sont sur les 2 rives du fleuve et celui-ci est très utilisé pour le transport de personnes et de fret en pirogue du fait de la quasi absence de routes.


Faute d'orthographe à Apatou, première commune bushinengée de notre parcours. Apatou est la seule commune bushinenguée du Maroni à être reliée par une route. Là vivent principalement des Aluku.


Art tembé: c'est l'art des noirs marrons
Le lendemain on a fait 7 h de pirogue pour aller à Grand Santi, un village Ndjuka. On a fait de la pirogue-stop: se faire prendre par une pirogue de fret qui remonte le fleuve contre paiement. On s'est retrouvé sur des bidons d'essences pendant les 7h de trajet!  Pas très confortable mais c'était rigolo!
En fait entre les principaux villages où nous nous sommes arrêtés il y a des dizaines de hameaux (sur les 2 rives ou sur les îles du Maroni) donc c'est vraiment très vivant.









Petites vidéos:



Restaurant flottant perdu au milieu du fleuve, on ne les a pas pris en photo, mais il y a également de nombreuses barges d'orpailleurs sur la rive surinamienne :(
Grand Santi



Au bar de chez Rémi, un bushi de Grand Santi. Le village est joignable par avion ou part le fleuve.



Pirogue doublée: elles sont fixées ensemble avec des planches et servent au transport de véhicules: voitures/engins de chantiers, etc!

Ballade en forêt à Grand Santi

Julia et une liane tortue  (d'après les légendes amérindiennes, elles permettraient aux tortues de monter dans les arbres) 

Ne pas tomber! Ne pas tomber!


Pause au bord d'une crique.

Un magnifique criquet arlequin


"en face", c'est à dire le Suriname



Il nous aura fallu 6 h pour rejoindre Papaïchton en pirogue. C'est la capitale des Aluku. Pour y aller on s'est retrouvé dans une première pirogue qui avait des pannes de moteur alors qu'on avait des sauts à franchir (petits rapides, c'était hyper rassurant... ) puis dans une grosse pirogue de fret où le piroguier avait embarqué sa sono et nous a passé du gros ragga dès 8h du matin à fond (on a pas la vidéo mais c'était vraiment drôle)!
C'était un superbe tronçon où on a vu plein de toucans et où les sauts se faisaient plus fréquents.







Art tembé, Papaïchton



L'ambiance sur le Maroni est marquée par l'origine africaine des bushinengés notamment au niveau de la peinture tembé, des sculptures, de la musique et également par la culture rasta avec beaucoup de reggae, de rastafari, etc. 
Sinon à Papaïchton, on est allé à un festival de reggae qui a commencé avec 3h de retard et où la tête d'affiche n'est pas venue... Du coup avec tout le retard qu'ils ont pris, quand on s'est réveillé à 7h30 pour prendre la pirogue, il y avait encore des groupes qui jouaient! 
C'était sympa malgré tout car il y avait une ambiance de fête du village avec les gens qui sont venus des hameaux avoisinants, qui étaient tous sur leur 31 (les nanas étaient quasiment toutes en talons énormes et robes à paillettes ou de soirée alors que c'était un concert de reggae!).
C'est aussi l'endroit où on acheté un ciel de case Wayana à un artisan wayana (amérindiens du haut Maroni), en fait c'est une tranche de fromager (un arbre) peinte avec des pigments naturels qu'on fixe en haut du carbet pour se prémunir contre les dangers. 
Ciel de case avec tortue au centre, et en périphérie 2 jaguars, 1 animal marin fantastique, 1 chenille géante, 1 grenouille, 1 oiseau, 1 lézard et 1 poisson (on offre une bouteille de rhum à qui les identifie!).

On a finis notre périple à Maripasoula où on avait déjà été auparavant et d'où on pris l'avion pour SLM et pour rentrer sur Cayenne voir le grand défilé nocturne du Carnaval de Cayenne (on était un peu crevés à la fin)!


Petite photo qui n'a rien à voir avec le Maroni, il s'agit d'un paresseux qui était juste à côté de nous sur un sentier qu'on a fait de nuit (le Rorota à côté de Cayenne). Il était vraiment tout près! 






4 commentaires:

  1. excellent reportage comme d'hab!
    Vous êtes pas allé à la recherche du point tri-frontière?
    Nous avec Renaud on a remonté l'Isère en hors bord, frontière naturelle entre le grésivaudan de l'ouest (habité par les crollois et leur accent marrant) et le grésivaudan de l'est, ou aucune route digne de ce nom n'existe.

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  2. Oui les grenoblois de l'ile verte sont un peu comme les guyanais créoles, il ignorent jusqu'à l'existence des tribus autochtones peuplant les contreforts du col du coq. Belles photos en tout cas ça avait l'air chouette!

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  3. C'est un peu fatiguant qu'à chaque commentaire, un ordinateur me demande de prouver que je ne suis pas un robot!

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